Politique et immigration

Qu’entend-on par "politique des quotas" ?

En France, la politique des quotas visait à limiter l’immigration, en fonction de la nationalité ou de la qualification, pour favoriser l’emploi des nationaux. Elle a été appliquée dans les années trente (loi du 10 août 1932 qui accordait la priorité au travail des citoyens français dans l’industrie), mais n’a pas été retenue dans les Ordonnances de 1945 qui ont fixé le cadre juridique des politiques d’accueil et de séjour des étrangers.

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Une immigration choisie pour une intégration réussie, Georges Wolinski
Une immigration choisie pour une intégration réussie
Georges Wolinski © Musée national de l'histoire de l'immigration

Une politique relancée

C’est le candidat puis le président Nicolas Sarkozy qui a relancé cette politique dite des quotas. Elle vise alors à contingenter chaque immigration, soit par profession soit par l’origine nationale des immigrés, soit par "catégories", c’est-à-dire en distinguant les immigrations familiale, étudiante ou professionnelle. L’objectif étant de favoriser cette dernière sur la première.
Depuis 2016, le Passeport Talent qui vise à attirer la main d’œuvre qualifiée, ne parvient pas à répondre aux besoins en emplois de l’économie française. Plusieurs secteurs d’activités sont régulièrement en tension (filières agroalimentaire, industrielles, le BTP ou la restauration) laissant vacants quelques 100 à 150 000 emplois et ce malgré l’augmentation de l’immigration professionnelle depuis plusieurs années.
C’est pour répondre à ce besoin qu’en 2020, s’inspirant du modèle canadien, un rapport de la Cour des comptes préconisait de recourir à une politique de quotas pour l’immigration professionnelle  « autour de cibles quantitatives pluriannuelles fondées sur les niveaux de qualification et les secteurs professionnels ». La différence avec les politiques en vigueur, réside dans le fait qu’au lieu de fixer des quotas en fonction d’« objectifs chiffrés » d’immigration professionnelle à partir de la liste des métiers en tension, la Cour propose que les travailleurs étrangers candidatent sur la base de leur qualification, et plus à l’initiative de l’employeur.

Une politique en débat

En juillet 2009, la Commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration, présidée par Pierre Mazeaud, estimait que les quotas « seraient irréalisables ou sans intérêt ». Inapplicables pour l’immigration irrégulière, ils pourraient, selon la commission, favoriser la venue d’immigrants nouveaux, incités à venir satisfaire les contingents fixés par les pouvoirs publics. Par ailleurs, en matière d’immigration professionnelle, la législation existe déjà qui encadre l’emploi de nouveaux immigrés. Enfin, la politique visant à limiter le nombre des entrées pour motif familial demeure quant à elle soumise au respect des conventions internationales et au « droit constitutionnel à une vie familiale normale ».
Pour les sages, il était alors plus judicieux de favoriser les va-et-vient entre le pays d’origine et la France et ainsi rompre avec des politiques publiques vieilles de près de quarante ans. Sans aller jusque-là, le Président Macron déclarait au quotidien La Voix du Nord, le 1er février 2022 : « les quotas, ce n’est pas réaliste. On ne saurait pas les tenir. (…) Nous sommes collectivement hypocrites : des filières ont besoin d’immigration. Notre volonté, c’est d’abord de pousser les demandeurs d’emploi et bénéficiaires du RSA vers celles-ci et d’avoir une politique incitative, via les réformes de l’apprentissage et de l’assurance-chômage ».

Mustapha Harzoune, 2022