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Gravure représentant Napoléon Bonaparte et une Egyptienne accompagné de son fils.
Anonyme, Trait de bienfaisance de l'Empereur envers une Égyptienne, Premier quart du XIXe siècle, Musée national de l'histoire de l'immigration
© EPPPD-MNHI

Trait de bienfaisance de l’Empereur envers une Egyptienne

En 1798, le général Napoléon Bonaparte entreprend une expédition militaire en Égypte. Elle est, pour la France, une carte à jouer dans la guerre contre l’Angleterre, en permettant d’affaiblir le commerce britannique.  Elle s’inscrit également dans une perspective coloniale : l’Égypte permet d’avoir un contrôle sur l’aire méditerranéenne et d’ouvrir un chemin vers le commerce de l’Inde. La conquête est stoppée par deux événements majeurs, la capitulation de l’armée française au Caire et à Alexandrie, poussant ainsi au départ des centaines de partisans de Napoléon à embarquer des ports égyptiens à partir de la fin du mois de juillet 1801.

L’arrivée d’une nouvelle catégorie de réfugiés

Le traité signé entre la France, l’Angleterre et l’Empire Ottoman prévoit le retour en France des soldats venus avec Bonaparte, mais également des Égyptiens ayant servi la présence française et souhaitant s’exiler. Ce sont quelques milliers de personnes qui partent des ports égyptiens pour se rendre à Marseille. On y compte des militaires, ainsi que des civils avec femmes et enfants. En octobre 1801, l’arrivée à Marseille donne lieu à la création d’une nouvelle catégorie administrative : le réfugié d’Égypte. Ce statut permet aux Égyptiens fraîchement arrivés d’obtenir de modestes pensions qui constituent l’essentiel des revenus des plus vulnérables. En contrepartie, ces derniers sont assignés à résidence dans la ville de Marseille. 

L’installation des réfugiés égyptiens

Ce statut de « réfugié égyptiens » donne l’impression d’un ensemble homogène. Ce n’est pourtant pas le cas, tous les réfugiés de ce groupe ne sont pas Égyptiens, il y a parmi eux des Libanais et des Syriens, des coptes, des melkites, des orthodoxes, des musulmans… dont le seul point commun est la langue arabe, créant ainsi, d’après la thèse de Ian Coller (Ian Coller, Arab France. Islam and the Making of Arab Europe, 1798-1831), une communauté arabophone en France. Les positions sociales varient également entre les individus : certains sont employés dans la diplomatie, la plupart des officiers de l’armée d’Égypte intègrent quant à eux l’armée impériale, et d’autres survivent grâce à la pension du statut. 
A partir de 1811, les « réfugiés égyptiens » ont le droit de quitter Marseille. Certains vont à Paris pour essayer d’y faire carrière grâce à leur langue natale, en tant qu’interprètes, traducteurs ou professeurs de langue. Se faisant, cette communauté commence à s’intégrer à la société.

Le changement de paradigme sur la figure de l’Egyptien

Néanmoins cette « idylle » franco-arabe se détériore largement à partir de 1815. Victimes de la Terreur blanche, coincés entre l’armée impériale et les royalistes, les « Égyptiens » deviennent des ennemis de l’intérieur et sont victimes des massacres de Marseille en juin 1815. 
Puis la colonisation de l’Algérie à partir de 1830 modifie considérablement le rapport entre la France et l’Afrique du Nord poussant les réfugiés égyptiens, désormais considéré comme des « sans-droits porteurs d’une identité barbare » (Éric Saunier, Ian Coller, Muslims and Citizens. Islam, Politics, and the French Revolution, Yale University press, 2020), à quitter Paris pour aller s’installer dans le bassin méditerranéen.

Julien Derni

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