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The cut – La blessure

Troisième volet d’une trilogie sur "l’amour, la mort et le mal", après Head-on et De l’autre côté, The cut raconte les épreuves d’un forgeron arménien d’Anatolie, Nazaret Manoogian, qui parvient à échapper aux massacres de 1915.

Croisant autant de frères en humanité que de bourreaux, il erre de pays en pays (Syrie, Liban, Cuba, Etats-Unis) à la recherche de ses filles. Fatih Akin, né en Allemagne de parents turcs, a voulu lever le tabou qui persiste en Turquie, cent ans après, sur le génocide des Arméniens, mais son film est aussi, dit-il, "un western" et "une histoire sur l’immigration et l’émigration", sur la foi et la survie. "La blessure", c’est le coup de couteau dans la gorge qui rend Nazaret muet et le condamne au silence, c’est le massacre qui le sépare à jamais de sa famille décimée, c’est aussi la mémoire niée et mutilée de la tragédie.

Si l’ampleur de cette fresque historique et internationale contraste avec les précédents films de Fatih Akin c’est toujours à travers le regard de son héros, incarné avec justesse par Tahar Rahim, que les événements sont évoqués. Comme s’il voulait s’adresser au plus grand public possible, et d’abord en Turquie, pour nous convaincre que l’histoire d’un génocide concerne chacun de nous, le cinéaste a sacrifié en partie son art de la complexité à sa volonté de nous faire ressentir au plus près le cheminement de Nazaret. Et de même que celui-ci rit et pleure sans retenue devant Le Kid de Charlie Chaplin (au prix d’un léger anachronisme, seul accroc repéré à la véracité des faits), l’empathie que l’on ressent pour lui est sans failles.
Le film est sorti en Turquie le 6 décembre.

Irène Berelowitch

The cut – La blessure
Film de Fatih Akin (Allemagne /France, 2014, 138mn)
Avec Tahar Rahim, Simon Abkarian
Scénario : Fatih Akin et Mardik Martin
Sortie en salle le 14 janvier 2015