En septembre 2013, les revues Hommes & Migrations et Rue Saint Ambroise ont célébré les quarante ans de la présence chilienne en France dans le cadre d’une semaine culturelle consacrée au Chili initiée par le Conseil régional d’ÎIe-de-France. Cette collaboration entre revues du champ des sciences sociales et de la littérature a permis d’organiser plusieurs tables rondes dont ce numéro publie les contributions. Avec Bernardo Toro que je remercie chaleureusement pour son investissement personnel, il nous a semblé que cet exil était emblématique dans l’histoire française. D’abord, parce que le poids démographique, la provenance non européenne et les profils sociologiques des réfugiés lui confèrent un caractère exceptionnel. L’accueil des Chiliens a de plus bénéficié d’un formidable mouvement de sympathie et de solidarités en France, notamment auprès des associations, des organisations syndicales et politiques de la Gauche, des intellectuels, des artistes, et s’inscrit dans l’histoire des droits de l’Homme. Un héritage politique dont la France, beaucoup plus crispée sur son identité, semble aujourd’hui s’éloigner. Enfin, Bernardo Toro insiste sur l’extrême fécondité culturelle et artistique des exilés chiliens installés ici, dans laquelle la littérature occupe une place essentielle. Cette productivité foisonnante a ouvert plus largement les portes aux écrivains latino-américains dans l’espace littéraire francophone et a rapproché culturellement les deux pays à la chute de Pinochet. Après leur retour au Chili, les anciens réfugiés ont continué d’entretenir des relations très étroites avec la France, nourries d’une histoire commune et de respect mutuel.

Nous remercions également Olivier Cogne, directeur du Musée de la résistance et de la déportation de l’Isère - Maison des droits de l’homme, pour un  partenariat qui a permis de prendre la région grenobloise comme terrain d’observation de cette arrivée des Chiliens, à partir des travaux réalisés pour l’exposition Exiliados. Le refuge chilien en Isère, la seule à notre connaissance à avoir été consacrée à ce thème à l’automne 2013.

Les illustrations du dossier proviennent de la série photographique Hijos del exilio (2003, 2013) acquise par le Musée de l’histoire de l’immigration et que son auteur, Éric Facon, a bien voulu nous autoriser à reproduire avec des extraits de témoignages.

D’un exil à l’autre… Il se trouve que l’année 2014 démarre par une saison culturelle sur le Vietnam. Plusieurs chroniques coordonnées par Laetitia Van Eeckhout explorent l’épopée des travailleurs indochinois mobilisés pendant la Deuxième Guerre mondiale comme main-d’œuvre supplétive dans les usines d’armement ou au champ, et évoquent les mémoires des Vietnamiens exilés en France dans les années 1970, dont la présence culturelle reste vivante jusqu’à présent.