La revue l’avait annoncé. Ce deuxième volume du panorama régional des histoires des immigrations poursuit la découverte des flux migratoires qui ont marqué depuis le milieu du XIXe siècle l’histoire des territoires, des terroirs et des villes françaises. Ce dossier rassemble les récits historiques réalisés par les équipes sélectionnées par l’Agence pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé). La rédaction a choisi de le regrouper selon une logique simple : les grandes régions de l’immigration qui correspondent à des pôles de croissance économique et urbaine ; les régions d’immigration modeste ou récente où souvent le monde rural a joué un rôle important ; les régions d’outre-mer dont les migrations échappent à l’Hexagone. Ces histoires attestent de l’apport des populations étrangères à la construction des sociétés et des identités régionales. Les résultats de ces études historiques constituent de ce point de vue une avancée fondamentale dans la connaissance de l’immigration en France, car elles explorent la dimension régionale des phénomènes migratoires tout en maintenant une ambition nationale et une cohérence scientifique qui a été assurée par la coordination d’une équipe d’historiens rassemblés autour de Gérard Noiriel.

2La rédaction souhaite que ces synthèses puissent apporter un premier aperçu des études régionales que le lecteur pourra bientôt consulter dans leur intégralité sur le site Internet de l’Acsé ou à la médiathèque de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration qui vient d’ouvrir au public début avril.

3Cette médiathèque porte le nom d’Abdelmalek Sayad en hommage à ce sociologue, proche de Pierre Bourdieu, qui a durablement guidé les études sur l’immigration en France par la profondeur et l’originalité de sa pensée. Outre le don à la médiathèque de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration de l’ensemble des archives de Sayad que Rebecca, sa femme, a voulu préserver de la destruction ou de l’éparpillement, cette reconnaissance souligne combien son œuvre propose aujourd’hui, dix années après sa disparition, des repères fondamentaux pour les travaux menés dans le domaine des sciences sociales sur l’immigration ici et à l’étranger. Travaux que la revue s’est efforcée, depuis plusieurs décennies, de diffuser auprès d’un public universitaire et plus largement.

4Certains des membres du comité de rédaction ont connu Abdelmalek Sayad ; ils se souviennent d’une personnalité à l’écoute et généreuse, associant rigueur scientifique, modestie et engagement militant sur les enjeux liés aux migrations. Il s’intéressait à toutes les sources permettant de mieux comprendre les réalités migratoires et à toutes les problématiques qui émergeaient progressivement dans le champ des études sur l’immigration à partir des années 1960, sans sectarisme ni a priori. L’héritage qu’il nous laisse, ce sont ses publications et la masse de la documentation rassemblée pendant des années de travail qui est aujourd’hui consultable à la médiathèque de la Cité. Mais, également, son ouverture d’esprit, sa liberté de pensée, sa méfiance à l’égard des discours formatés, et surtout son travail méticuleux des sources.