7Les œuvres du parcours Palais
Assemblée élargie (constellation 0)
de Katinka Bock
née en 1976 à Francfort-sur-le-Main, vit et travaille entre Paris et Berlin.
Cette première œuvre perçue par les visiteurs affirme d’emblée l’enjeu d’une exposition conçue spécialement pour le lieu et élaborée avec la participation de celles et ceux qui le font vivre.
Au centre du hall d’honneur, un mobile se balance, étrange constellation de sculptures porteuses de la mémoire d’échanges entre l’artiste et des personnes travaillant au Palais de la Porte Dorée. Invitée à participer à cette exposition, Katinka Bock s’est intéressée aux personnes qui prennent physiquement soin du monument et des animaux qui l’habitent. Elle a engagé un travail de don et contre-don avec l’équipe de nettoyage et celle des aquariologistes. Au cours d’entretiens, elle a collecté des objets symboliques donnés par ces personnes, et les a enveloppés de feuilles de céramique avant de les passer au grand feu. Calcinés dans le processus de cuisson, les objets échangés sont mis au secret dans l’argile. Leur forme influence la sculpture qui en résulte, sans que l’on puisse deviner ce qui a été remis. Comme si la sculpture n’était que la rumeur d’une conversation.

Legende
Claude Closky, Oiseaux migrateurs, hall d'honneur du Palais de la Porte Dorée
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© Claude Closky

Travail préparatoire autour de l'œuvre Assemblée élargie (constellation 0) de Katinka Bock
© Katinka Bock
Oiseaux migrateurs
de Claude Closky
né en 1963 à Paris, vit et travaille à Paris.
Collés dans le vaste ciel du hall d’honneur, des poèmes planent au-dessus des visiteurs. Vrais poèmes rimés au nombre de pieds soigneusement calculé, ils forment un grand vol d’oiseaux noirs ou de vaisseaux spatiaux glissant à la surface des murs et du plafond. Les textes sont inspirés de dialogues tirés de films de science-fiction et retravaillés par Claude Closky, qui attache une grande importance aux mots. Invasion de territoire, domination sociale et culturelle, usage de la violence, exploitation des ressources ou exportations de déchets : nombreux sont les parallèles entre l’histoire coloniale et le cinéma d’anticipation. Associant des personnels du Palais à son enquête, l’artiste nous immerge dans un monde dystopique où rôdent d’inquiétantes silhouettes.
In The Skeleton of the Stars
de Mathieu Abonnenc
né en 1977 à Paris, vit et travaille à Sète.
Poursuivant leur parcours vers le salon Afrique, les visiteurs en devinent l’aménagement et le mobilier de Jacques-Émile Ruhlmann, ainsi que le décor composé des fresques de Louis Bouquet. Mathieu Abonnenc y conçoit une installation vidéo directement inspirée du lieu. Le film projeté, réalisé in situ et projeté sur un immense écran vertical installé au centre de l’espace circulaire, nous amène des confins de l’univers aux surfaces peintes des murs. Également composée de récits de rêves recueillis auprès du personnel du Palais par l’artiste ainsi que de séquences chorégraphiées, la vidéo crée des jeux de résonance et d’échelle. Le corps géant d'une danseuse filmé de près, comme s’il était trop grand pour la caméra, déborde du cadre et incarne une divinité céleste inconnue, issue d’une mystérieuse mythologie. L’écran devient alors un portail vers d’autres temporalités.
untitled 2023 (invasives)
de Rirkrit Tiravanija
né en 1961 à Buenos Aires, vit et travaille entre Berlin, New York et Bangkok
et Vivien Zhang
né en 1990 à Pékin, vit et travaille à Londres.
À l’entrée de l’ancienne médiathèque, un long espace est couvert d’un papier peint et de tableaux, indiquant une généalogie végétale dont le sens résonne avec le musée et l’idée de migration. Cette installation, conçue en 2023 par Rirkrit Tiravanija et Vivien Zhang, est ici réadaptée en écho à l’histoire du Palais et au sens de l’exposition. L’arbre de vie répété est issu de la représentation du célèbre naturaliste Ernst Haeckel, première représentation de l’origine de la biodiversité. L’artiste Rirkrit Tiravanija y a incorporé 40 noms d’espèces considérées comme invasives dont l’Ailanthus altissima, variété chinoise introduite en Europe comme arbre d’ornement et devenue mondialement invasive. Les tableaux floraux de Vivien Zhang rythment cette installation, et leur style évoque une culture digitale qui se serait peu à peu substituée aux styles régionaux, caractérisant une génération déracinée ou nomade, déliée, en tout cas, de ses origines culturelles.

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Untitled 2023 (invasives), de Rirkrit Tiravanija. Photo Cyril Zannettacci
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© Rirkrit Tiravanija
En Crypt
de Teresa Fernández-Pello
née en 1992 à Madrid, vit et travaille aux Pays-Bas.
Installée dans la perspective digitale créée par l’œuvre commune de Rirkrit Tiravanija et Vivien Zhang, l’œuvre de Teresa Fernández-Pello évoque à son tour un monde électronique et l’infini mémoire des data. Elle accueille en son cœur le grand To’o Mata des îles Marquises. Les matériaux high-tech disposés, connectés, façonnés par l’artiste, portent dans leur organisation et les formes qu’ils produisent la réminiscence des espaces cérémoniels. Ils renvoient par leurs fonctions, même détournées, à l’utilité mémorielle de ces cordelettes sacrées. Ce cœur symbolique de l’exposition est signifié par les battements lumineux qui émanent des combinaisons électroniques fabriquées par l’artiste.

Legende
En Crypt, de Teresa Fernández-Pello. Photo : Cyril Zannettacci
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© Teresa Fernández-Pello

En Crypt, de Teresa Fernández-Pello. Photo : Cyril Zannettacci
© Teresa Fernández-Pello
En souvenance
de Charlie Aubry
né en 1990 à Lillebonne, vit et travaille à La Courneuve
et de Seham Boutata
née en 1978 à Paris, vit et travaille à Paris.
À la suite de l’autel électronique très structuré de Teresa Fernández-Pello, l’installation de Charlie Aubry mêle sons, paroles enregistrées, projections vidéo, objets électroniques détournés et mobilier historique du Palais dans le savant désordre d’une création sonore et visuelle foisonnante. Avec l’autrice et documentariste Seham Boutata, spécialiste de l’oralité et des récits populaires, ils ont recueilli des paroles d’enfants, de visiteurs, d’employés, avec l’idée de restituer aux personnages et animaux représentés sur l’imposante façade sculptée du monument une histoire, un passé, une réalité qui dépassent les stéréotypes ayant inspiré leur création. Cette œuvre conjointe de Charlie Aubry et Seham Boutata engage les visiteurs dans un espace sonore et visuel qui appelle à se défaire des archétypes de la représentation de l’altérité.

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En souvenance, installation de Charlie Aubry et de Seham Boutata. Photo Cyril Zannettacci
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© Charlie Aubry et Seham Boutata

En souvenance, installation de Charlie Aubry et de Seham Boutata. Photo : Cyril Zannettacci
© Charlie Aubry et Seham Boutata
Aze Ze Ame Adre (Les Sept vases de sorcellerie)

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Travail préparatoire autour de l'œuvre Aze Ze Ame Adre (Les Sept Vases du Sorcier) de Kokou Ferdinand Makouvia
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© Kokou Ferdinand Makouvia
de Kokou Ferdinand Makouvia
né en 1989 à Lomé (Togo), vit et travaille entre Paris et Amsterdam.
En pénétrant dans le vaste hall Marie Curie, les visiteurs sont confrontés aux sept colonnes de céramique du sculpteur togolais Kokou Ferdinand Makouvia. Modelées par l’artiste comme des vases de tailles différentes, elles rappellent les sept jours de la semaine. À l’intérieur de chaque vase, l’artiste a déposé des feuilles de kpatima (Newbouldia laevis), plante d’Afrique de l’Ouest aux multiples qualités mystiques et thérapeutiques, qui diffusent leurs vertus purificatrices au travers de l’argile poreuse. Entre les jointures des fûts et dans une urne, les visiteurs sont invités à déposer des mots, souhaits, messages, adressés à eux-mêmes, à des aïeux, à des lointains ou à une divinité. Ces messages sont régulièrement brûlés par l’artiste, et leurs cendres sont utilisées pour créer une encre qui permet aux visiteurs suivants de rédiger à leur tour de nouveaux messages.

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Aze Ze Ame Adre (Les Sept vases de sorcellerie) de Kokou Ferdinand Makouvia. Photo : Cyril Zannettacci
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© Kokou Ferdinand Makouvia
Myanmar house et Around Me Project
de Aung Ko
né en 1980 à Yangon (Myanmar), vit et travaille à Paris.
Artiste d’origine birmane ayant fui le Myanmar suite au coup d’État en 2021, Aung Ko réalise une œuvre inspirée des maisons traditionnelles de son pays d’origine. Les paysages de son village natal, les traumatismes de la guerre civile, la perte, l’exil, le conduisent à développer à Paris, où il est réfugié, un travail autour de la notion de communauté. Le « nous », l’expression de la collectivité, la mémoire des ancêtres, la résistance à la dislocation sont la source de son œuvre.

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Myanmar house de Aung Ko en cours de construction dans le hall Marie Curie du Palais de la Porte Dorée
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© EPPPD-MNHI
Au Palais de la Porte Dorée, pendant plusieurs semaines, il construit un refuge, un espace de travail et de convivialité, avec l’aide des visiteurs invités à coudre avec lui l’habillage de cet abri à partir de vêtements collectés à cette fin. Vêtements de proches, de disparus, ou portés lors de moments importants, bref les dépouilles de nos souvenirs qui nous aident à reconstruire le présent, sublime réparation symbolique des frêles coutures qui nous relient encore.
Avec Around Me Project, Aung Ko réalise également des portraits enlevés d’habitants du Palais ou de personnes de passage. Pour lui, dessiner est une manière d’entrer en connexion avec l’autre lorsqu’il n’existe pas de langage commun pour communiquer.
Anchoring

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Anchoring de Nge Lay. Photo : Cyril Zannettacci
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© Nge Lay
de Nge Lay
née en 1979 à Pyin U Lwin (Myanmar), vit et travaille à Paris.
Nge Lay a fui son pays, la Birmanie, à la suite du coup d’État, laissant derrière elle famille, amis et effets personnels. Dans une démarche empreinte de spiritualité, l’artiste arpente les territoires qui l’entourent en poursuivant son travail sur l’histoire et la mémoire. Pour elle, les mutations culturelles et politiques mondiales nous affectent physiquement et émotionnellement. Dans le hall Marie Curie, elle imagine une œuvre composée d’immenses moustiquaires noires sur lesquelles des mots brodés à larges traits sont comme les fils d’un destin mis en jeu. En s’inspirant de son expérience personnelle et d’échanges avec des personnes migrantes dans le cadre de workshops qu’elle a menés pour ce projet, elle suggère la complexité du quotidien des réfugiés, et met en lumière le destin de milliers de gens.
À l’usage des fantômes

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À l’usage des fantômes, de Amalia Laurent
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© Amalia Laurent
de Amalia Laurent
née en 1992 à Paris, vit et travaille entre Paris et Nîmes.
Dans l’espace monumental du Forum, Amalia Laurent déploie un immense voilage peint qui joue des effets de transparence et de lumière. Transgressant les frontières entre monde réel et mondes parallèles, elle révèle les harmonies et vibrations qui unissent matière physique et croyances dans les pratiques ritualisées, dans un esprit qui rejoint les effets subtils de la musique traditionnelle javanaise qu’elle pratique. Inspirée de la tapisserie de pierre ornant la façade du bâtiment ainsi que des fresques du Forum, l’œuvre en retrouve les couleurs, gardant l’anonymat des personnages dont certains visages arrivent à se détacher. Comme si leur présence s’intégrait au rythme coloré que l’artiste invente en leur hommage.

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À l’usage des fantômes, de Amalia Laurent. Photo : Cyril Zannettacci
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© Amalia Laurent

À l’usage des fantômes, de Amalia Laurent © Cyril Zannettacci
© Amalia Laurent
Que ressent-on lorsqu’on vit avec deux cultures ?
de Juliette Green
née en 1995 à Semur-en-Auxois, vit et travaille à Paris.
Depuis l’école, Juliette Green, artiste du labyrinthe de la vie, note ses réflexions et enlumine ses écrits. Il s’agit le plus souvent de propos, profonds ou absurdes, sur le sens des choses, l’énigme du destin, le mystère des lieux ou des objets. Par cette pratique, qui va de la simple feuille de papier au dessin monumental de plusieurs dizaines de mètres, elle donne aux motifs une plasticité sans cesse réinventée, et trouve une équivalence plastique entre ses sujets et leur forme. Art de la distance, humour et empathie soulignent les situations étranges dans lesquelles l’enchaînement des circonstances nous met parfois.

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Que ressent-on lorsqu’on vit avec deux cultures ? de Juliette Green. Photo : Cyril Zannettacci
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© Juliette Green
Assemblée élargie (constellation -1)
de Katinka Bock
Au-dessus de la fosse aux alligators, Katinka Bock réalise une sculpture résultant d’échanges d’objets avec le personnel de l’Aquarium, dans le même esprit que le grand mobile présenté dans le hall d’honneur. Fascinée par l’incroyable réseau de plomberie qui serpente en sous-sol pour alimenter les bassins, elle intègre à sa composition un long tuyau de cuivre issu des réserves du Palais qui appartenait autrefois à ce réseau. L’artiste établit des parallèles entre le bâtiment et le corps humain et, par cette présence, donne à voir le système invisible, mais vital, infiniment complexe qui irrigue le Palais.
Voyager sous l'eau
de Juliette Green
L’univers poétique de Juliette Green rencontre l’espace insolite de l’Aquarium tropical. Au milieu des nombreux bassins, elle réalise une œuvre faite de verre bleu sur lequel elle a gravé des récits inédits résultant d’échanges avec l’équipe scientifique. Prenant pour point de départ la question suivante : « Les poissons connaissent-ils les frontières ?», elle met en relief les destinées des habitants non humains du Palais.

Legende
Voyager sous l'eau de Juliette Green. Photo : Cyril Zannettacci
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© Juliette Green