Au musée : littérature

Le Musée, un tremplin vers le passé ?

Une BD sur l’histoire de l’immigration

A l’occasion de la refonte du parcours permanent du Musée national de l’histoire de l’immigration, les éditions Delcourt, réputées pour la production de BD historiques, ont proposé au Musée de réaliser un album qui raconterait l’histoire de l’immigration à travers la découverte par deux lycéens – Anna et Idriss - des objets emblématiques des collections exposées au Musée.

rédactrice en chef de la revue

L’intrigue de cette bande dessinée est construite autour de la déambulation de deux lycéens qui se perdent dans le nouveau parcours permanent du Musée et découvrent, avec surprise, des objets correspondant à des histoires migratoires singulières. En parallèle de cette narration de l’histoire des migrations, selon une chronologie définie en 11 « dates piliers » par la scénographie du Musée, le dialogue entre les deux adolescents permet d’évoquer leurs questionnements, leurs liens avec les générations passées de l’immigration, leurs rapports aux institutions (école, musée notamment) et leurs « tensions » identitaires. Leurs regards parfois biaisés sur l’histoire de l’immigration changent au fur et à mesure qu’ils progressent dans cette visite clandestine du Musée. Une voix off permet de détailler certains aspects de ces histoires migratoires par des compléments scientifiques issus des travaux d’historiens.

A l’heure actuelle, il n’existe pas de bande dessinée qui offre une fresque sur deux siècles de l’histoire de l’immigration. L’originalité de cet ouvrage tient à cette double narration croisant l’histoire des migrations vers la France et celle des deux jeunes visiteurs qui sont intimement interpellés par ce qu’ils apprennent sur l’histoire au Musée.

La parution de cette BD est prévue pour l’ouverture de la nouvelle exposition permanente du Musée à l’automne 2022. Les auteurs de cet album, deux artistes déjà engagés sur cette problématique de l’immigration, ont accepté de livrer à la revue Hommes & Migrations quelques planches retraçant la genèse de ce projet.

Halim Mahmoudi, journaliste, dessinateur de presse, est aussi auteur BD. Dès son premier album Arabico (Soleil, 2010), suivi de Un Monde Libre (Des Ronds dans l’O, 2014), Halim s’est attaqué aux sujets liés à l’immigration. Ses albums suivants décloisonnent les narrations habituelles en abordant d’autres « exils » comme dans Petite Maman (Dargaud, 2017) qui questionne la place des enfants dans un monde qui ne leur laisse pas leur place ; ou Falloujah (Steinkis/Les Escales, 2020) qui traite de l’enquête interdite de Feurat Alani sur un des plus grands crime contre l’humanité en l’Irak. Halim a développé une « Analyse graphique des images » qu’il dispense depuis 2015 à travers des cours et conférences auprès des institutions, écoles et universités. En 2022, il publiera chez Steinkis La Maison des Enfants, et La Femme la plus Dangereuse du Monde. Et en 2023, un album d’enquête sur la dématérialisation du monde ( Editions Ecosociété, Canada).

Flore Talamon s’intéresse à la question des migrations dès son premier roman pour la jeunesse, L’étrangère (Nathan, 2004), qui évoque les questionnements d’une adolescente empêtrée dans sa double culture franco-portugaise. En tant que scénariste de BD, elle a publié récemment deux romans graphiques, Salam Toubib et Refuznik, dans lesquels elle explore le drame de la guerre d’Algérie sous l’angle d’un médecin appelé en Algérie entre 1959 et 1961 et celui de la difficile émigration juive d’URSS. Elle publie, plus largement, des albums sur des sujets sociétaux comme celui des lanceurs d’alerte, et enseigne dans une école de BD parisienne.