Ciao Italia !
Un siècle d’immigration et de culture italiennes en France (1860-1960)
Du 28 mars au 10 septembre 2017
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L'exposition
Avec Ciao Italia !, le Musée national de l’histoire de l’immigration rend compte, pour la première fois, de l’histoire de l’immigration italienne en France, qui reste la plus importante de l’histoire française.
Dès la seconde moitié du XIXe siècle et jusque dans les années 1960, les Italiens furent les étrangers les plus nombreux dans l’Hexagone. Aujourd’hui célébrée, leur intégration ne se fit pourtant pas sans heurts.
Entre préjugés dévalorisants et regards bienveillants, violences et passions, rejet et intégration, l’exposition traduit les contradictions spécifiques de l’histoire de cette immigration tout en mettant en lumière l’apport des Italiens à la société et à la culture françaises. Jouant des clichés et préjugés de l’époque et rappelant la xénophobie dont ils étaient victimes, l’exposition s’attache à retracer le parcours géographique, socio-économique et culturel des immigrés italiens en France.
Abordant tout à la fois la religion, la presse, l’éducation, les arts, la musique et le cinéma, les jeux et le sport, ou encore la gastronomie, elle donne à voir tous ces Italiens, ouvriers, mineurs, maçons, agriculteurs, artisans, commerçants, entrepreneurs qui ont fait la France tout en rendant hommage aux plus connus d’entre-eux à l’instar d’Yves Montand, de Serge Reggiani, de Lino Ventura ou encore des familles Bugatti et Ponticelli.Dans un dialogue original et fécond entre documents d’archives et œuvres artistiques, ce sont près de 400 pièces qui sont présentées au travers d’un parcours où figurent les artistes Giovanni Boldini, Giuseppe de Nittis, Gino Severini, Renato Paresce, Filippo De Pisis, Massimo Campigli, Mario Tozzi, Alberto Magnelli, Leonardo Cremonini.
Commissariat :
- Dominique Païni, commissaire d’expositions indépendant
- Stéphane Mourlane, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université d’Aix-Marseille
- Isabelle Renard, responsable de la collection d’art contemporain au Musée national de l’histoire de l’immigration
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Prologue
L’arbre généalogique de très nombreux Français se ramifie de branches italiennes, symboles d’une immigration transalpine ancienne, devenue massive entre les années 1860 et 1960 et désormais bien intégrée.
Les échanges entre la France et l’Italie existent depuis l’Antiquité gallo-romaine. À partir du Moyen-Âge, des hommes, des femmes, des produits, des idées traversent les Alpes, manifestant l’influence du "modèle italien" sur la France et sur le reste de l’Europe. D’illustres noms créent le roman national par leur apport à l’histoire politique et à la culture du pays : Médicis, Concini, Mazarin, Vinci, Lully…
D’autres, moins connus, paysans saisonniers, saltimbanques, négociants ou banquiers sont aussi les acteurs de cette histoire italienne de la France. Chacun à sa manière dessine un portrait de l’Italien à la fois séduisant et parfois condescendant. Ce statut ambivalent subsiste à l’âge industriel face à "l’invasion" des migrants transalpins. La situation politique et économique de l’Italie conduit à l’exil alors que la France manque de main-d’œuvre. Les Italiens s’imposent comme la première nationalité étrangère dans l’Hexagone au début du XXe siècle et contribuent à l’essor de l’industrie, à l’urbanisation et retardent "la fin des paysans".
L’accueil n’a pas toujours été chaleureux. Avec les "macaronis", l’immigration pose problème. La proximité culturelle souvent vantée et bien réelle n’empêche pas les manifestations xénophobes, exacerbées en période de crises. Puis, les différences avec les "Ritals" s’estompent au fil des générations jusqu'à l’invisibilité. Français et Italiens s’en satisfont. Cependant, l’italianité ne se dissout pas totalement, marquant de son empreinte la culture française. Elle lui apporte une couleur, une tonalité, un goût et même une forme d’érotisme esthétique.
Des expressions artistiques variées, des évocations d’itinéraires, de lieux et de récits d’existences quotidiennes entre France et Italie témoignent que l’heure est au rappel d’une immigration relativement oubliée, parfois idéalisée mais dont l’héritage est considérable.
Focus : 1860-1960. L’immigration italienne en4 grandes périodes
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D’où viennent-ils ?
Les lieux d’origine des migrants italiens en France dessinent une géographie précise. Des provenances communes se révèlent : les régions du nord de la Péninsule d’abord, non loin de la frontière (Piémont, Toscane, Lombardie, Emilie-Romagne). Puis, plus tard, après la Seconde Guerre mondiale, les régions méridionales.
La migration implique d’emprunter des lieux de passage, chemins, routes, trains, frontières, gares, ports, centres de contrôle plus ou moins bien définis selon les époques. Ces lieux structurent une mémoire de la migration à la tonalité parfois épique.
Au gré des filières familiales et villageoises et des offres d’emploi, les Italiens se regroupent en France dans les mêmes régions, les mêmes quartiers, les mêmes rues, aux allures de "Petites Italies". Ils fréquentent des lieux de divertissement dans des cadres formels (associations) ou informels (guinguettes, cafés). On cultive l’entre-soi, le souvenir du pays, mais aussi une sociabilité ouverte car les activités et les pratiques sont inscrites dans la culture populaire : jeux, musique, sport… L’ambiance se veut joyeuse, loin du regard souvent misérabiliste sur l’immigration.
Les lieux de piété sont d’autres points d’enracinement. La fréquentation des églises (animées par des missionnaires investis également dans l’action sociale) la participation aux fêtes votives ou aux pèlerinages constituent pour les migrants italiens une manière de rester fidèles à leurs racines, de trouver des ressources spirituelles face à l’épreuve de la migration. Dans bien des cas, au sein d’une paroisse fréquentée aussi par des Français, ils s’intègrent à une communauté solidaire.
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Que font-ils ?
Au XIXe siècle, les Italiens sont d’abord visibles dans les rues, exerçant des petits métiers ambulants souvent à la limite de la marginalité : saltimbanques, ramoneurs, vitriers, cireurs de souliers, vendeurs de statuettes… Des artisans se taillent une solide réputation dans les domaines de la décoration ou de l’habillement. Ils font écho au génie artistique transalpin qu’incarnent les artistes qui, comme par le passé, continuent de trouver à Paris une source d’inspiration. La culture italienne se diffuse aussi par les gens du cirque, dans les commerces alimentaires, restaurants ou cafés. Le sens de l’hospitalité des Italiens semble les désigner, par ailleurs, au secteur de l’hôtellerie ou de la domesticité.
Les Italiens sont toutefois plus nombreux sur les chantiers du bâtiment et des travaux publics. Ils forment également les bataillons d’une main-d’œuvre peu qualifiée d’ouvriers et de manœuvres qu’appelle la révolution industrielle dans les usines et les mines. La France manque de bras. Dans les campagnes aussi, les Italiens freinent l’exode rural.
Le recrutement des migrants est encouragé par le patronat qui apprécie leur robustesse physique, leur habileté manuelle et leur docilité. En acceptant les tâches les plus pénibles et les moins bien rémunérées, ils suscitent, surtout en période de crise, la colère des travailleurs français.
Néanmoins, le travail demeure un puissant vecteur d’intégration. Il favorise les contacts avec les Français et donne à certains l’opportunité d’une ascension sociale par la création d’une petite entreprise, l’acquisition d’un commerce ou d’une propriété agricole.
Focus : Les métiers des migrants italiens
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Que nous laissent-ils ?
Les Italiens venus en France ont apporté dans leurs bagages leur culture sous toutes ses formes : politique, linguistique, gastronomique, matérielle ou encore artistique. Le rôle de passeurs, de médiateurs culturels des Italiens est sans doute favorisé par l’appartenance à une même communauté de civilisation latine.
La langue française s’est appropriée une partie du lexique italien. La gastronomie est appréciée : café, glaces, pasta, pizza sont au goût de tous et désormais à tous les menus. Ces produits révèlent dans leur conception l’habileté des artisans italiens.
L’élégance mais aussi les capacités créatives des Italiens suscitent l’admiration. Dans le secteur mécanique, les automobiles et les motocyclettes aux lignes harmonieusement dessinées, installent l’Italie et les Italiens dans la modernité. Les Bugatti en font le prestige, la Fiat 500 et la Vespa la popularisent. L’image répandue d’un archaïsme transalpin s’estompe progressivement.
Mais des stéréotypes demeurent, véhiculés notamment par le cinéma et les guides touristiques. "Si tout le monde n’est pas artiste, tout le monde s’occupe d’art", peut-on lire dans les années 1960 à propos de l’Italie. Le talent de ces Italiens venus en France, au registre aussi varié que Leonetto Cappiello, Alberto Magnelli, Leonardo Cremonini, Yves Montand, Lino Ventura ou encore Cino Del Duca… atteste de cette prédisposition.
La Dolce Vita de Fellini est perçue en 1960 comme un condensé facétieux de la culture italienne et marque la fin de l’immigration "historique" et visible.
L’empreinte culturelle italienne en France est profonde. Elle enseigne aujourd’hui la richesse des migrations.
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1860-1960, l’immigration italienne en 4 grandes périodes
1860-1870 - Une nation de migrants
1861 marque l’unité de la peninsula italienne jusque-là divisée. Au même moment, et dans un apparent paradoxe, une partie de la population quitte la Péninsule. Ils sont 14 millions lors de cette "Grande émigration" qui s’étend jusqu’à la veille du premier conflit mondial. Ils seront environ 26 millions, entre les années 1860 et les années 1960. Difficultés économiques, archaïsme social et tensions politiques sont les causes de cet "Ulysse collectif", un des plus importants mouvements migratoires de l’époque contemporaine.
1880-1910 - Violences et passions
Les "Vêpres marseillaises" (17-20 juin 1881) posent l’immigration italienne comme un problème au sein de la société française. Dans un climat d’exacerbation nationaliste, cette "chasse aux Italiens" se traduit par trois morts et vingt-et-un blessés. Quelques années plus tard, le bilan est plus lourd encore lors des affrontements d’Aigues-Mortes (16 août 1893 - en savoir plus) avec huit morts et plus de cinquante blessés. Ces deux événements sont l’expression spectaculaire de manifestations xénophobes plus quotidiennes. L’immigration italienne est perçue comme une "invasion", défavorable aux travailleurs français et souvent associée à la criminalité ou au terrorisme anarchiste.
1920-1940 - À l’ombre du fascisme
Giulia Andreani, Portraits d'antifascistes, 2016-2017 © Courtesy de l'artiste
Au début des années 1930, les Italiens n’ont jamais été aussi nombreux en France (plus de 800 000). Si, comme par le passé, leur politisation reste faible, la situation politique de leur pays d’origine et l’engagement militant de quelques-uns rejaillissent sur une majorité absorbée par le travail. Après l’arrivée au pouvoir de Mussolini, en octobre 1922, fascistes et antifascistes tentent de se rallier les sympathies des immigrés et s’opposent parfois violemment. Les autorités et l’opinion françaises n’apprécient guère ces troubles à l’ordre public et les menaces de déstabilisation de l’ordre politique que font peser ces Italiens.
1950-1960 - Dolce vita
L’accord de main-d’œuvre franco-italien de 1947 ouvre la dernière phase du flux migratoire transalpin qui se tarit au début des années 1960. Le succès du film de Federico Fellini entre en résonance avec les représentations d’une italianité aux allures de "Dolce Vita". Dans l’Hexagone, les Italiens ne font plus figure de menace.
À l’heure où le tourisme inverse le courant migratoire transalpin, l’Italie apparaît comme un théâtre de divertissement animé par ces "cousins latins" si exubérants, insouciants et indisciplinés, mais si attachants, à l’élégance sensuelle et au grands talents artistiques et gastronomiques.
En savoir plus : Les italiens en France : jalons d’une migration, dossier thématique de Stéphane Mourlane (commissaire de l'exposition)
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Les métiers des migrants italiens
Parmi tous les métiers exercés par les migrants italiens, certains sont restés dans l'imaginaire collectif comme symboliques de cette immigration.
Des figurinai aux mouleurs
La notoriété des figurinai - artisans ambulants fabriquant des statuettes en plâtre appelées figurine - se propage un peu partout en Europe à partir du XVIIIe siècle. Pour la plupart, originaires de la région de Lucques en Toscane, ils travaillent en groupes (compagnie), encadrés par un chef (capo) et entourés de plusieurs jeunes apprentis vendeurs, les garzoni.
Les figurinai, équipés de paniers remplis de reproductions bas de gamme de sculptures antiques et modernes, se déplacent de lieu en lieu, à la recherche de nouveaux clients. Vers la fin du XIXe siècle, l’activité connaît une évolution notoire. Les plus doués et audacieux abandonnent les paniers pour ouvrir leurs ateliers. C’est à ce moment-là qu’ils deviennent de véritables mouleurs, créateurs de modèles.Les maçons
Entretien avec François Cavanna, 2008 © Atelier du Bruit
"L’avenir c’est pas un problème… ils seront maçons" écrit, dans Les Ritals, François Cavanna, fils d’un maçon italien de Nogent-sur-Marne, à propos des jeunes immigrés transalpins. En France, cette profession est devenue emblématique des Italiens en qui l’on voit volontiers les héritiers des bâtisseurs de la Rome antique ou de l’Italie de la Renaissance. Les maçons transalpins sont nombreux sur les chantiers, succédant à Paris aux maçons du Limousin. Les Italiens exercent en fait un nombre plus large de métiers plus ou moins qualifiés dans le bâtiment et les travaux publics, l’un des secteurs d’emploi privilégiés. Ils sont manœuvres, terrassiers, peintres, plâtriers, carreleurs, stucateurs ou encore mosaïstes. Pour beaucoup d’entre eux, à l’instar du père de François Cavanna, la réussite sociale passe par la création d’une petite entreprise. Ces Italiens ont construit routes, voies ferrées, ponts, barrages, villes ou encore maisons de France.
En savoir plusLes entrepreneurs : les frères Ponticelli
À sa mort, en 2008 à 110 ans, Lazare Ponticelli entre dans l’histoire comme le "dernier des poilus". Il incarne aussi avec ses frères, Céleste et Bonfils, le symbole de l’une des grandes réussites entrepreneuriales au sein de l’immigration italienne en France. La famille Ponticelli, avec ses cinq enfants, est originaire de Bettola dans le Val de Nure en Emilie-Romagne. La mère d’abord, puis progressivement les enfants partent rejoindre la communauté de cette région installée à Nogent-sur-Marne. Quand la guerre se déclare, Céleste et Lazare s’engagent dans la légion étrangère au sein de l’unité composée d’Italiens et commandée par l’un des petits-fils de Giuseppe Garibaldi. À la dissolution de la légion garibaldienne alors que l’Italie entre en guerre aux côtés de la France, les deux frères sont enrôlés dans l’armée de leur pays d’origine. De retour en région parisienne, ils fondent une société de fumisterie appelée à un avenir prospère grâce à une grande capacité d’innovation notamment dans le secteur pétrolier.
En savoir plus
L'exposition Ciao Italia a été réalisée avec le soutien de l'entreprise Ponticelli Frères.Les industriels : la société Simca
La marque à l’emblème d’hirondelle est un temps la quatrième entreprise automobile française avec une large gamme de voitures populaires et prestigieuses. Son fondateur, Enrico Teodoro Pigozzi, naît à Turin en 1898. Héritier d’une entreprise de transport qu’il vend après la Première Guerre mondiale, il s’installe à Paris pour y diriger une société d’import-export de métaux principalement destinés à la FIAT. À partir de 1926, il importe et commercialise en France les véhicules de la marque turinoise. Il travaille d’abord à l’assemblage de ces voitures arrivées d’Italie en pièces détachées au sein de la Société anonyme française des automobiles Fiat (SAFAF). Il crée ensuite, en 1934, la Société industrielle de mécanique et de carrosserie automobile (SIMCA) qui produit ses propres véhicules. Celui qui se fait désormais appeler Henri Théodore Pigozzi dirige l’entreprise jusqu’à ce quelle soit rachetée, en 1963, par la société américaine Chrysler. Il s’éteint à Paris en 1964.
Les artisans et les commerçants
La propriété d’un commerce est perçue par les immigrés italiens comme l’un des symboles d’intégration et de réussite sociale. Les parcours migratoires varient, mais tous bénéficient de la liberté de commerce instaurée dans l’Hexagone par la Révolution française. À partir des années 1920, la réglementation se durcit toutefois à l’égard des étrangers en réponse aux discours xénophobes sur le thème de la concurrence déloyale. Si la dimension ethnique ne détermine pas toujours le secteur d’activité des Italiens, les secteurs du vêtement et de l’alimentation les attirent. Nombreux sont les modistes, tailleurs, chapeliers et cordonniers dans les grandes villes. Ils tiennent aussi des épiceries, des cafés ou des restaurants dont la clientèle s’élargit au-delà de la communauté d’origine. Avec l’appui des chambres de commerce italiennes, ces commerçants participent à la diffusion de modes et de produits transalpins en France.
En savoir plus"Gueules noires" et hommes du fer
Les secteurs minier et sidérurgique emploient une forte main-d’œuvre italienne. Dès la fin du XIXe siècle, des Italiens vont à la mine à Gardanne, dans les Bouches-du-Rhône ou à La Mure en Isère. Après la Première Guerre mondiale, ils sont nombreux dans le Nord et le Pas-de-Calais aux côtés des Polonais. "Gueules noires", ils sont aussi "gueules rouges" dans les mines de Bauxite du Var. On les retrouve nombreux également en Lorraine dans les mines de fer où ils trouvent aussi à s’employer à la fabrication de l’acier dans les bassins de Longwy, de Briey et de Villerupt notamment. Avant 1914, dans les entreprises du fer de Lorraine, les trois quarts des embauches concernent des Italiens. Le recrutement se poursuit et s’élargit ensuite aux Méridionaux. Au fond ou près des fourneaux, le travail est toujours pénible et dangereux.
Les agricultureurs
Les régions du Sud-Est de la France et des Alpes voient de longue date des travailleurs agricoles saisonniers franchir la frontière dans un mouvement constant de va-et-vient. Certaines activités sont structurées autour de filières spécialisées comme celles des bûcherons et des charbonniers originaires de la province de Bergame. La dégradation des conditions de vie en en Italie ainsi que le développement d’une agriculture plus commerciale dans des campagnes françaises en manque de main-d’œuvre, du fait de l’exode rural, entraîne une migration plus durable. Les zones d’implantation s’élargissent. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, les Italiens participent grandement au repeuplement rural et au renouveau de l’agriculture dans le Sud-Ouest. Le savoir-faire des Italiens y est reconnu dans l'acclimatation de variétés précoces de céréales (blé, maïs) ou de légumes, la maîtrise des techniques d'ensilage ou d'élevage laitier, la mécanisation dont quelques-uns ont été parmi les pionniers.
En savoir plusLe travail des femmes
La figure du migrant italien est masculine. Les hommes ont certes toujours été plus nombreux que les femmes à émigrer, mais l’écart tend à se resserrer à la fin du XIXe siècle, sous l’effet à la fois d’une migration plus familiale et du développement de filières autonomes de migrations féminines. Au-delà de la "traite" de jeunes filles destinées à la prostitution, certains secteurs d’activité apprécient cette main-d’œuvre. Dans l’industrie textile d’abord, où l’emploi féminin domine, les Italiennes sont souvent majoritaires. Marseille fournit un cas intéressant de diversification de l’emploi féminin dépassant la figure traditionnelle de la portereis, débarquant les oranges sur le port. À Grasse, les Italiennes sont plus nombreuses que les Italiens à la fin du XIXe siècle, trouvant à s’employer dans l’industrie de la parfumerie. Elles occupent, par ailleurs, de nombreux emplois domestiques dans les quartiers bourgeois des villes françaises. La figure de la nourrice piémontaise devient même archétypale.
Le travail des enfants
À la fin du XIXe siècle, la législation française restreint et encadre le travail des enfants. Pourtant de jeunes Italiens occupent de petits métiers ambulants comme les vendeurs de statuettes ou les "petits cireurs napolitains", fréquemment évoqués à Marseille. D’autres trouvent à s’employer dans l’industrie, dans les soieries pour les jeunes filles ou dans les verreries de la région lyonnaise et parisienne pour de jeunes garçons dès l’âge de 11 ans. Leurs conditions de recrutement, de travail et de vie dans des garnis suscitent une vive émotion en Italie. 1 600 à 1700 enfants italiens travaillent dans les verreries selon le rapport du marquis Paulucci di Calboli. Le premier secrétaire de l’ambassade d’Italie à Paris, y dénonce le recrutement des jeunes gens arrachés à leur famille par des agents peu scrupuleux. L’action de l’État italien et des missionnaires catholiques met progressivement un terme à ces pratiques jugées scandaleuses.
En savoir plus -
Les antifascistes
Depuis le XIXe siècle, l’exil politique est une composante de l’immigration italienne en France. L’arrivée au pouvoir de Mussolini en 1922, et plus encore le tournant totalitaire du régime en 1925, contraignent les opposants, dirigeants de premier plan ou militants, à fuir l’Italie.
Très surveillés par la police française, parfois menacés d’expulsion, les Fuoriusciti poursuivent leur engagement en France au sein d’un mouvement antifasciste très divisé. Libéraux, Républicains, Socialistes, Communistes ou Anarchistes divergent idéologiquement mais aussi sur les modes d’action.
À la voie légaliste par des meetings ou des campagnes de presse s’oppose la confrontation directe, et parfois violente, avec les fascistes.La Ligue italienne des Droits de l’Homme et le journal Giustizia e Libertà, formés à Paris, visent à transcender ces clivages. Il faut cependant attendre 1937 pour que, dans l’esprit du Front Populaire, la gauche italienne antifasciste se rassemble au sein de l’Union populaire italienne.
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Portraits d'artistes
Yves Montand
Yves Montand est né Ivo Livi, à Monsummano Terme, en Toscane en 1921.
Alors qu’il est âgé de trois ans, son père, militant communiste, est contraint d’émigrer avec sa famille en raison des persécutions fascistes qui aboutissent à l’incendie de son atelier de fabrication de balais. Si, comme beaucoup de migrants le projet est de "Fare l’America", le voyage s’arrête à Marseille à cause des restrictions à l’immigration imposées par les États-Unis. La famille Livi retrouve à Marseille une importante communauté toscane et s’installe dans les quartiers industriels et ouvriers du Nord de la ville.
Ivo travaille d’abord dans une fabrique de pâtes. Mais le spectacle l’attire. Il s’invente un nom de scène en référence à sa mère qui, dans un mélange d’italien et de français, l’appelle : "Ivo, monta". Sa carrière débute sur les scènes du music-hall marseillais, dont le fameux Alcazar, avant de rejoindre Paris au milieu de la guerre. Chanteur et comédien, il devient une grande vedette internationale.
Lino Ventura
Lino Ventura a été l’un des acteurs les plus appréciés et les plus populaires de France. Il est né à Parme, en 1919, dans une famille modeste.
En 1926, il émigre en France avec sa mère et s’installe à Montreuil, en région parisienne, où résident des parents. Stigmatisé à l’école en raison de ses origines, Lino travaille dès l’âge de huit ans comme livreur, garçon d’ascenseur et groom dans un hôtel, puis coursier pour la Compagnie Italienne de Tourisme à Paris. En 1943, il est appelé sous les drapeaux en Italie et intègre un bataillon alpin. Il ne tarde pas à déserter pour regagner la France.
Grâce à un physique imposant, il devient un lutteur de très bon niveau ; sur les rings de catch, il est "la fusée italienne". Il fait ses débuts au cinéma en 1954. Très attaché à son pays d’origine, Lino Ventura a toujours conservé la nationalité italienne.
Serge Reggiani
"C’est moi, c’est l’Italien" chante Serge Reggiani en 1971, rappelant ainsi qu’il a été un immigré italien. Né à Reggio d’Emilie en 1922, il quitte l’Italie en 1930, à huit ans, en raison des pressions que subit son père, opposant au régime fasciste.
Les Reggiani s’installent d’abord en Normandie puis à Paris où les parents ouvrent un salon de coiffure, rue du Faubourg-Saint-Denis. La famille Reggiani poursuit son engagement antifasciste en adhérant à la Fratellanza Reggiana de Paris. Serge, qui pratique la boxe, n’hésite pas à faire le coup de poing contre les fascistes de Paris. C’est toutefois vers le théâtre qu’il se tourne en entrant au conservatoire. La chanson ne vient que bien plus tard, à l’âge de 45 ans, tandis qu’il tourne de nombreux films en France comme en Italie, pays auquel il reste lié.
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A la découverte des œuvres et des artistes
Les œuvres :
Le massacre d'Aigues-Mortes à travers des gravures publiées dans la presse française et italienne
Salines rouges. Aoüt 1983, Aigues-Mortes, 2017
Gli emigranti (Les Emigrants) d'Angelo Tommasi, 1896
Portrait de Benito Mussolini par Adolfo Wildt, 1923
Les artistes : Leonnetto Capiello
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Coulisses du montage de l'expo
La mise en place des premières œuvres
L'arrivée d'un tableau monumental au musée…
Events
Visites guidées de l'exposition Ciao Italia !
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Visites chantées
Sicilia et Tunisia
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Sur les traces de l’immigration italienne
Dolce - pâtisserie à l'italienne
Italianité : l’immigration en ses lieux
Retour en Italie. Pratiques de migrants et politiques de gouvernements
L'Italie pour bagage
Marseille, port de transit pour les émigrants italiens (1860-1914)
Balade Ciao Italia ! La Courneuve
Informations pratiques
Adresse
Palais de la Porte Dorée
293, avenue Daumesnil
75012 Paris
Horaires d'ouverture
- du mardi au vendredi de 10h à 17h30 (fermeture de la billetterie à 16h45)
- le samedi et le dimanche de 10h à 19h (fermeture de la billetterie à 18h15)
Fermé le lundi.
Tarif
Tarif unique sur place : 6 €.
Ce tarif inclut le droit d’entrée à l’exposition permanente et aux expositions temporaires du Musée.
L'entrée est gratuite pour les moins de 26 ans et pour tous le premier dimanche de chaque mois.
Réservations pour les groupes : 01 53 59 64 30 - reservation@palais-portedoree.fr
Nos ressources en ligne sur l'immigration italienne
Collections :
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Témoignages :
Dossiers thématiques :
- Les Italiens en France : jalons d’une migration (un article de Stéphane Mourlane)
- Les Italiens dans l’agriculture du Sud-Ouest, 1920-1950 (un article de Laure Teulières)
Podcast :
- Le massacre des Italiens. Aigues-Mortes, 17 août 1893 (conférence de Gérard Noiriel)
- Exploités, protégés ? Les enfants migrants italiens au travail à la Belle Époque (conférence de Caroline Douki)
Partenaires
L'exposition a été réalisée avec le soutien de :
Partenariat média
Autres partenaires
(voir le dossier en ligne réalisé par Altritaliani : "Odyssée italienne - Histoires de l’immigration italienne en France 1860-1960 et au-delà")