La stratification historique de la diaspora explique son hétérogénéité. Dès les années 1960, avec les revenus perçus par l’exportation du pétrole et l’application d’une série de réformes de  modernisation, la société iranienne a assisté à l’émergence de riches familles urbaines qui ont commencé à voyager à l’extérieur de l’Iran et notamment en Occident et à y envoyer leurs enfants pour leur éducation supérieure.

Avec l’avènement de la révolution en 1979, une grande partie des étudiants partis à l’étranger est restée dans le pays d’étude et d’autres membres de leur famille les ont rejoints en raison de leur proximité avec la monarchie de l’ancien régime ou de leur implication dans l’armée. A ces émigrés, se sont rajoutés progressivement les sympathisants d’autres mouvements politiques qui avaient participé à la révolution mais qui en ont été rapidement exclus avec la consolidation du pouvoir autour de l’Ayatollah Khomeiny et des mouvements islamistes qui ont adhéré à l’idéologie du Guide. Depuis, la présence de l’opposition iranienne (ou plutôt des oppositions) à l’étranger n’a pas arrêté de se recomposer et elle est aujourd’hui plus que jamais diverse et mouvante.

Les trajectoires se sont diversifiées, elles ne s’orientent plus exclusivement vers l’Amérique du nord et l’Europe mais de nouvelles destinations émergent, en particulier en Asie. Les mouvements récents sont constitués de personnes qualifiées, d’entrepreneurs, d’universitaires et d’étudiants représentant des classes moyennes assez nombreuses. En particulier, les artistes iraniens participent intensément aux réflexions sur les expériences migratoires.  Les départs mais aussi les retours et les voyages prennent de multiples formes et contribuent à la formation de cette iranité off-shore des mille et une frontières de l’Iran que décrit Fariba Adelkhah dans son dernier ouvrage.

On assiste également à l’intensification des mouvements transfrontaliers beaucoup plus anciens des populations des périphéries iraniennes vers des territoires proches. Inversement, l’Iran est aussi un pays d’immigration pour le voisinage notamment pour l’Afghanistan et l’Irak.

Même si la politique du gouvernement iranien reste ambiguë à l’égard de sa diaspora, il n’en demeure pas moins que le fait migratoire a renforcé son rayonnement régional et sa participation à la mondialisation ; ce qui fait d’elle une puissance diasporique.