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À la fin du XVIIe siècle, le royaume de France est une terre d’immigration et d’émigration. Les étrangers qui s’y installent viennent surtout des pays frontaliers, pour des motifs principalement économiques mais aussi politiques ou religieux. Rares sont les étrangers qui obtiennent une « lettre de naturalité » leur permettant de devenir sujets du roi.
Dans le même temps, la traite transatlantique se développe : dans les possessions françaises des Antilles, l’économie de plantation est alimentée par la mise en esclavage de captifs africains ayant survécu à cette migration forcée. En mars 1685 est promulgué l’« édit sur la police des esclaves des îles de l’Amérique française », connu sous le nom de Code noir, qui synthétise près de cinquante ans de réglementations issues de coutumes et de jurisprudences locales.
En octobre 1685, Louis XIV signe l’édit de Fontainebleau qui interdit l’exercice public de la « religion prétendue réformée », le protestantisme. Les protestants français – ou huguenots – sont sommés de se convertir au catholicisme. En deux ans, près de 100 000 d’entre eux s’exilent vers des terres plus accueillantes en Europe, mais aussi aux Antilles et en Afrique australe.
Repères chronologiques
Adoption de l’édit « sur la police des esclaves des îles de l’Amérique française », appelé plus tard « Code noir ».
L’édit de Fontainebleau révoque l’édit de Nantes qui avait été signé en 1598 par Henri IV et qui octroyait aux protestants la liberté de conscience, l’égalité civique ainsi qu’une liberté de culte restreinte. Près de 100 000 huguenots quittent le pays.
À la suite de la deuxième révolution anglaise, le roi catholique Jacques II s’exile en France, suivi de 30 000 à 40 000 jacobites (partisans du roi) anglais, écossais ou irlandais.
Afin de redresser ses finances, la monarchie décide de taxer « tous les étrangers installés dans le royaume depuis 1600, ainsi que leurs descendants, héritiers et ayants droit ».
Déclaration du roi pour la « police des Noirs » interdisant « à tous, Noirs, Mulâtres et Gens de couleur, d’entrer en France », à l’exception des domestiques.
Esclavage et traite au temps du Code noir
La traite transatlantique des personnes réduites en esclavage prend son essor au XVIIe siècle. Elle relie l’Europe, l’Afrique, l’Amérique et la Caraïbe. En 1674, les possessions françaises des Antilles deviennent des colonies royales. En 1685, est adopté un édit sur « la police des îles de l’Amérique française », bientôt appelé Code noir. Il institutionnalise un nouvel ordre racial. Entre 1713 et 1791, un million de captifs africains sont vendus comme esclaves et déportés aux Antilles, dont plus de 775 000 à Saint-Domingue. À la veille de la Révolution française, les esclaves représentent plus de 80% de la population des Antilles françaises, le reste étant des colons et des « libres de couleur ». Ces derniers, affranchis ou descendants d’affranchis, n’ont pas les mêmes droits que les Français blancs.
Noirs en métropole au XVIIIe siècle
En principe, il n’y a pas d’esclaves en métropole car la « terre des Francs » est censée rendre libre. En 1777, face à l’arrivée d’esclaves dans les ports de la façade atlantique comme Nantes ou Bordeaux, une déclaration du roi « pour la police des Noirs » interdit d’introduire, dans le royaume, des « Noirs, Mulâtres, ou autres Gens de couleur ». Ceux qui arrivent en dépit de cette interdiction sont arrêtés et conduits dans des « dépôts », pour être ensuite rembarqués vers les colonies. Ce texte reste en vigueur jusqu’à la Révolution française.
L’exil des huguenots
« Un roi, une loi, une foi » : c’est au nom de ce principe que Louis XIV promulgue, en 1685, l’édit de Fontainebleau. Il révoque ainsi l’édit de Nantes, signé par Henri IV en 1598, qui accordait aux protestants une liberté de culte. Les huguenots (protestants français) sont alors sommés de se convertir au catholicisme. Face aux persécutions (appelées dragonnades), plus d’un quart d’entre eux préfèrent s’exiler. Ils sont accueillis dans les Provinces-Unies (actuels Pays-Bas), en Suisse, en Angleterre et en Prusse. Certains vont jusqu’en Afrique australe et dans les colonies britanniques du Nouveau Monde. Entre 1680 et 1715, 180 000 huguenots quittent la France. C’est le mouvement migratoire le plus important de l’Ancien Régime.
Les étrangers sous l’Ancien Régime
Le royaume de France attire marchands, colporteurs, paysans et artisans des pays frontaliers. Il recourt aussi aux services de spécialistes étrangers hautement qualifiés : artistes et banquiers italiens, marchands et armateurs hollandais et castillans, typographes et armuriers originaires d’outre-Rhin...
En dépit des restrictions imposées aux étrangers, la France de la monarchie absolutiste est non seulement une grande terre d’immigration mais aussi un lieu d’asile. Au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles, nombre d’exilés gagnent le royaume, comme les jacobites : partisans anglais, écossais ou irlandais du roi catholique Jacques II chassé par la révolution anglaise, ils rejoignent leur monarque réfugié en France.
Le contrôle des étrangers
Même si la monarchie absolutiste voit d’un œil plutôt favorable l’accueil des étrangers, ces derniers font l’objet de restrictions et de taxations spécifiques. Il leur est défendu d’acquérir un office (une charge administrative octroyée par le roi) ou d’exercer dans la banque et le courtage. Ils sont frappés par le droit d’aubaine qui permet au roi de saisir les biens des étrangers décédés sans héritier nés en France. Une minorité d’entre eux sont exemptés de ce droit, qu’ils habitent dans les villes portuaires et frontalières, ou qu’ils aient obtenu une « lettre de naturalité ».